Le Festival International des Jardins de Chaumont-sur-Loire se tiendra du 23 avril au 1 novembre 2015 et présentera sous la présidence de Patrick Blanc des « Jardins extraordinaires, jardins de collection ».
En attendant de visiter cette édition qui met en valeur le patrimoine vert, le génie végétal et la rareté botanique, voici une petite promenade parmi les jardins de la précédente saison 2014 qui était consacré aux « Jardins des péchés capitaux ».
Parmi les 26 jardins présentés, cinq d’entre eux ont décliné le péché d’avarice, la cupidité, l’avidité :
« Ma cassette » de Camille Luquet, Caroline Leroux et Céline Klippel est une promenade onirique au jardin d’Harpagon : une passerelle de bois brut, ondulant parmi les broderies de galets et cactus évoquant un jardin à la française, mène à la cassette d’osier vert et au bassin débordant de balles dorées.
« Quand l’Avare Rêve » (P-A Risser, V. Vallée, C. Noiville, J. Davies et P. Lamarque) sinue au long d’un chemin traversant d’abord un univers sec et terne, peuplé de plantes épineuses, réalité aride de l’obsessionnel de la possession, puis s’ouvre sur le rêve paradisiaque de l’avare, survolant un bassin inscrit dans une végétation devenue luxuriante et s’achevant sur une île au trésor.
« Le jardin mis en boites » (Alexandra Lehec, Victor Lepage et Kevin Lemonnier), où les plantes regroupées par couleur et variété poussent dans des boites de conserves et s’alignent comme dans les rayons des supermarchés, dénonçant l’avarice et l’injustice de la société de consommation des pays riches face à la pénurie des pays pauvres.
A voir : jardin n°7 de l’édition 2014 http://www.domaine-chaumont.fr/multimedia_videos?scat=10a&cat=10&expandable=5#p2014
Le «Toucher d’or » (Bertrand Colson et Gaëlle Le Borgne) narre le mythe du roi Midas qui avait le don de rendre or, tout ce qu’il touchait ; son jardin aux végétaux dorés s’orne d’un bel arbre resplendissant d’or, mais mort …
« Green without greed », à traduire par gazon sans avidité, des américaines Katherine Leise et Jessica Canfield, est un jardin-paradoxe, la pelouse, omniprésente dans tous les jardins américains et si gourmande en ressources, est ici totalement synthétique, sans entretien et sans vie …
Vanité, orgueil, envie et illusions hantent ces quatre autres jardins :
« Le domaine de Narcisse » (C. Montefoschi, N. Cau, L. Rebecchini, F. Dias, R. Walker Campos, F. Guanaschelli et M. Villanis Ziani) est un écrin précieux de buis abritant une pièce d’eau – miroir au cadre doré, où contempler son reflet, mais aussi où chercher l’autre côté.
© E. Sander
« Le jardin déchêné » (R. Bardin, M. Chevalier et A. Masillo) s’inspire de la fable de La Fontaine « Le chêne et le roseau », ici le chêne orgueilleux est à terre et la nature modeste reprend sa place tout autour.
« Haute culture » (V. Fayet, P. Legroux et J. Pouillard) s’ordonne autour d’un podium exposant des robes extravagantes à observer derrière des masques noirs plantés à l’entour.
« Le jardin des poules » (F. et J. Dubus, F. Genouvrier, S. Ben Lassued, S. Robinne, F. Cheverry et A. Chapus) est une fable sur l’orgueil et l’inconscience de l’humanité ici représentée par les poules qui vivent sans modération, dans la partie droite du jardin, du potager-Eden nourricier occupant la moitié gauche, tandis que les promeneurs peuvent prendre la place des dieux qui observent leur gaspillage.
Gourmandise et luxure sont au cœur de :
« Gourmanderie » de Sarah Sellam et Eugénie Denarnaud, parrainé par Gilles Clément, offre ses coupes d’osier débordants de végétaux gourmands au sens botanique du terme.
« Bloom », de J. Laure, H. Balalud de St Jean et G. Giraud, est une salle de banquet surréaliste dont la table offre 40 variétés de plantes fleuries au rouge gourmand, mais inconsommable.
« Le jardin de la grotte » du russe Ivan Zantchevski est celui où s’exercent séduction et luxure, jardin caché, clos et mystérieux, peut-être même effrayant …
Colère, jalousie, désirs et passions interdites ou impossibles baignent deux des jardins :
« Fleurs maudites » de Charlotte Trillaud et Lucien Puech, est une prison grillagée qui enferment ces plantes psychotropes que les hommes utilisent pour calmer leurs maux et leur colère, mais elles aussi sont en colère devant l’interdit qui les frappent : absinthe distillée en fée verte, agave bleue en téquila, noah en vin fou, houblon donnant à la bière son amer ; belladone, chanvre, datura, ipomée tricolore, jusquiame noire et pavot tous hallucinogènes ; digitale pourpre, grande cigüe, ricin et tabac, philtres de mort ; et enfin douce et calmante valériane. Peu à peu, les promeneurs se demandent si cet enfermement ne serait pas plutôt le leur… stupéfiant, non ?
« Pour l’amour de Tongariro » de Grégory Dubu et Rozenn Duley s’inspire d’une légende maori où deux volcans autrefois amis tombent amoureux d’un troisième, la belle Tongarino ; le conflit prend place au milieu d’une végétation tropicale luxuriante où désir, jalousie et colère s’expriment en projections de vapeur.
Mais qu’est ce qu’un péché ?
« Péchés virtuels », d’A.M. Arbefeuille, G. Pontet et P. Froissac, présente notre péché contemporain le plus évident, la virtualité, l’image par opposition à la réalité, la nature : d’un côté, cette nature libre et mouvante et de l’autre, deux ailes-tableaux colorés.
« Les sept pêchers capitaux » (G. Brulé, F. Lepeytre, J. Douesnard et F. Cazenave) est une référence à Thomas d’Aquin, la vie y est un chemin sombre, disque lisse autour d’un bassin circulaire, miroir d’introspection où se reflètent 7 pêchers-péchés.
« Les couleurs du péché » de Marie-Pierre Servante jouent eux aussi de l’homophonie péché-pêcher, au cœur de cet Eden vallonné, ce n’est pas un pommier mais un pêcher qui est tentation et décline toutes les nuances de son fruit.
« La balance » des anglais Simon Kitchin et Hay Joung Hwang s’interroge sur l’équilibre fragile entre vice et vertu, symbolisé par des balances de pierre noire au milieu de plantations colorées.
« Parcours initiatique – Allégories aquatiques des sept péchés capitaux » (A. Lachoux, G. Burrows et O.-M. Tombarello) prend l’eau pour fil conducteur : cascade coléreuse, miroir d’eau orgueilleux, goutte à goutte avaricieux, marécage paresseux, oasis envieuse, fontaine gourmande et grotte luxurieuse, au centre une île-confessionnal offre d’autres façons de voir.
http://hortulusbyomt.com/wp-content/uploads/2014/01/Projet_Chaumont_ALGBOMT2014.pdf
Purgatoire, enfer et paradis …
« Paradigme », d’Olivier Fouché et Jonas Lechat-Thomas, est une libre interprétation des dessins formant la carte de l’enfer de Botticelli, le parcours y est celui d’une vie, débutant dans l’innocence, croisant les 7 péchés capitaux et finissant face au royaume d’Hadès.
« Le purgatoire des tentations » (G. Marsiaj, V. Zechin et R. Cogno) est un jardin-repentir aux fleurs en camaïeu de bleus, mauves et violets, au terme du parcours, des tasses géantes invitent à s’asseoir pour une calme récréation.
« Le jardin des pécheresses » de Mélanie Gasté et Aurélien Albert est un confessionnal aux portes capitonnées pour plantes-pécheresses présentes dans sept chambres dédiées aux sept péchés capitaux.
La « Dissection du jardin d’Eden » (S. Lheureux, A. Jacquin, A. Blanchardon, A. Cloche et A. Roussille) sépare sept scènes – sept péchés symbolisés par des fleurs, fruits et légumes, on en sort en se demandant si le Paradis perdu ne serait pas que la synthèse de tous les péchés capitaux .
« Purgatorium », des américains D. Seiter, E. Egonneau, C. Howell et K. Cho, est une déambulation parmi plantes vertes et poteaux noirs vers un confessionnal, cercle aux barreaux noirs protégeant un miroir d’eau posé en son centre.
« Résurrection, ou l’éloge de la défaillance » d’Ana Moralès dessine des péchés qui ne sont que la sève de l’humanité et sont ici à déchiffrer dans les formes d’un béton drainant faillé qui rejoint une forêt originelle de fougères arborescentes, prêles et mousses.
« Paradis inversé » d’Arie Van der Hout et Richard Van den Berg dénonce les excès de la société de consommation et la pollution, péchés modernes, il intrigue par son odeur de caoutchouc, les arbres morts et les déchets qui le parsèment et s’achève devant un désert noir où ne poussent plus que des cactus.
http://www.domaine-chaumont.fr/multimedia_videos?scat=10a&cat=10&expandable=5#p2014
Domaine Régional de Chaumont-sur-Loire
41150 Chaumont-sur-Loire
Tél : 02 54 20 99 22
Photos du site http://www.domaine-chaumont.fr/festival_festival, ainsi que du site Jardins à l’anglaise qui en a fait une visite commentée (en anglais) : https://jardinsalanglaise.wordpress.com/2014/10/27/the-seven-deadly-sins-festival-international-des-jardins-at-chaumont-sur-loire/